vendredi 31 mai 2013

Nor a man, nor a woman.

Cet article est écrit à l'occasion de ma candidature sur le site Madmoizelle.
Néanmoins, je le met ici, parce que c'est mon beau blog aimé et choyé.

Je dois vous faire un aveu.
Pendant très longtemps j'ai refusé d'être une fille.
Disons le franchement, à l'adolescence, je ne me considérait même pas comme un être sexué.
Je m'habillait de manière très neutre, je me maquillait comme Brian Molko à l'époque (avec une truelle, donc), et même si j'avais un copain et une vie sexuelle (oui, ça arrive aussi à des gens très bien), je refusai catégoriquement qu'on me range dans la case "féminine" de la société.


Pourquoi?
Parce que je considérai qu'être une femme, une jeune fille, était un carcan social beaucoup trop pesant.
Du haut de mon souverain mépris adolescent (mon moi passé était un peu neuneu), je considérai les trois quart des filles comme des pintades, et je n'avais aucune envie de leur ressembler.
Quand à être un garçon, ma foi, ça m'attirait plus, ils semblaient avoir plus de libertés que moi. Mais le côté machiste que je pensais inhérent à la masculinité me dégoûtait. Les seuls garçons qui avaient grâce à mes yeux étaient les LGBT, et mon meilleur ami. (Qui était le plus macho de tous les hommes que j'ai pu fréquenter à cette époque, mais allez savoir...)

Je revendiquais donc ma non-appartenance à un sexe ou un autre.
Haut et fort.
Mes idoles étaient Brian Molko, donc, et David Bowie, parfaits exemples d’androgynes qu'on ne peut ranger dans des cases.
Et cette période a duré assez longtemps.

Jusqu'à ce que je réalise un jour que, oui, j'étais une femme, que oui, j'avais des seins, des fesses, des formes, qui faisaient partie de mon identité.
Que j'étais bien dans cette identité, et que je pouvais en jouer.
Et que même, être une femme me donnait pas mal de pouvoir, d'une certaine façon.




J'ai changé d'avis sur les garçons.
Je ne pense pas que les hommes sont tous des machos, mais je pense que la société pousse beaucoup d'hommes à envisager leur supériorité sur les femmes comme acquise.
Malgré ça, il m'arrive encore de me considérer comme un être assexué.
Je ne me pense pas en tant que femme, je ne me pense pas en tant que genre, mais je pense en tant qu'être humain.
L'individu avant le sexe.

Evidemment, auprès des garçons, c'est une catastrophe. Je leur fais souvent très peur. Un de mes amis m'avait expliqué que c'était parce que, inconsciemment, les filles ont un comportement sexué quand elles s'adressent à des hommes. Un comportement de séduction, et plus de passivité. Une fille attendra d'un homme qu'il la distrait dans une conversation.
Ce n'est pas du tout mon cas. J'ai plutôt tendance à installer un échange, quand je parle avec quelqu'un.
Et mon ami m'avait dit que, ce genre de comportement, venant d'une fille qui n'est pas lesbienne, aurait tendance à terrifier les hommes, qui ne trouvent pas leur repères par rapport à la personne qu'ils ont en face d'eux.

Je comprend la théorie de mon ami, et j'ai eu pas mal de fois l'occasion de la vérifier, malheureusement, je la déplore. Si il faut forcément faire preuve de passivité dans une conversation avec un homme, ne pas se montrer entreprenante même s'il n'y a pas de séduction en jeu, comment est-ce que que la société peut évoluer de manière à ce qu'il n'y ait plus de différences entre les genres?



Je parle aussi souvent de moi au masculin.
Pour plusieurs raisons toutes simples:
D'abord, il n'y a pas de neutre en français, tout est forcément masculin ou féminin.
Ce qui est foncièrement idiot. Un caillou n'est pas masculin. Pas plus que féminin. Et il y a des monsieur fleurs. Une fleur n'est pas forcément une fille.Je n'arrive pas non plus à voir la féminité d'une chaise... Mais passons.
Ensuite, le masculin est ce qui se rapproche le plus du neutre. Et il y a beaucoup trop de poncifs dérangeants liés à la féminité.
Si je dis que je veux devenir réalisateur, on me dit "non, tu veux devenir réalisatrice".
Nonon, je veux devenir réalisateur. Parce que je ne veux pas qu'on me pose la fameuse question "quelle est la place des femmes dans le cinéma aujourd'hui?".
Est-ce qu'on va demander à Spielberg quel est la place des hommes dans le cinéma?
Non.
Et on a bien raison. Cette question, au masculin ou au féminin est hors de propos.

Quand une fille veut faire du cinéma, on imagine toujours Sofia Coppola et son fameux "Marie Antoinette", avec des robes et de la dentelle. Ou du cinéma minimaliste et romantique.Voire quelque chose de vaguement indé, en noir et blanc.
Oui, mais moi je veux faire des films à gros budget avec des effets spéciaux, des trucs qui explosent, et des duels au sabre laser. Ou au revolver. Ou au katana. Plus Django Unchained que Virgin Suicides.
Je veux pas qu'on me parle de films de filles.
Mais je veux bien qu'on me parle de cinéma d'auteur.

C'est le même problème avec les écrivains femmes, avec les filles qui font des blogs bédés, etc...
J'aimerai bien qu'on demande à JK Rowling quelle est sa place en tant que femme, chez les écrivains d'aujourd'hui, tiens...
Une femme qui réussit est forcément confronté à cette question sur la place des femmes.
Et je n'arrive pas à me sentir concernée, ni même à comprendre le but de cette question.
Je suis une personne avant d'être un genre.
Je suis une personne derrière une caméra, pas des oestrogènes.

C'est pour ce genre de choses que j'admire énormément Andrej Pejic.
C'est un jeune mannequin, qui travaille aussi bien dans des vêtements masculins que féminins. Il a choisi de ne pas se définir, et même si son image dérange, il a été élu en 2011 comme une des femmes les plus belles de la planète. (Bon, par FHM, mais il n'empêche.)
C'est le genre d'homme à qui on a envie de dire "monsieur, vous êtes belle".




J'aimerai bien un jour, qu'on me dise "madame, vous êtes beau."
Ce jour là, je sais que j'aurais réussi à mélanger les genre et à transcender la barrière qu'être une femme m'impose.
J'aime ce que je suis, j'aime être une femme, mais je n'aime pas ce que la société veut faire de moi en tant que femme.
Je voudrais pouvoir être une personne avant toute chose. Qu'on me reconnaisse sur mon talent avant de prendre en compte que j'ai des boobs.


Ce serait un de mes plus grand accomplissement. En tant qu'être humain.
Même si pour cela  il faudrait que la société change profondément. Je pense qu'il faudrait aussi qu'on commence par changer la manière dont on se perçoit nous même.

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