lundi 22 avril 2013

Rebelle approuvé avec mention.


L'autre jour, étant en train de remplir les caisses de Bones-Land en faisant mon labeur quotidien au Domac (mon altesse donne de sa personne pour ses sujets), quand j'ai vu, attablés (et la bouche pleine de burger qui tâche), des jeunes gens au "dress code" familier:
Doc Martens à talons en cuir blanc.
Slim râpé aux genoux.
T-shirt trop large et troué d'à peu près partout.
Veste cloutée.
Ceinture cloutée. (oh, stud, I like you, filthy thing.)
...
Ma foi, un adolescent en marge de la société comme il y en a tant.
(Nous discuterons un autre jour de la manière dont toutes les couches sociales se mélangent au Domac, c'est pas le sujet.)
Un adolescent en marge de la société qui devait porter, en marque de fringues, l’équivalant de mon mois de salaire...
(tu la sens ma grosse contradiction?)

Le rebelle est chic, le rebelle s'habille chez les grands créateurs.
La question est:
Quand on a du pognon, pourquoi le montrer en portant des fringues de punkachien labellisées?
Seconde question:
Est-ce qu'avoir l'air d'un "rebelle" tout en étant plus sapé que Karl Lagerfeld est maintenant la norme sociale? Le pouilleux classe est-il à la mode?

Je ne m'attendais pas à ce qu'une bête rencontre me cause tant d'interrogations métaphysiques.

Le "rebelle" est classe.
Le "rebelle" a du charisme, est envié pour son côté nonchalant, pour son mépris des règles, etc, etc.
Mais à mois de s’appeler Pete Doherty, c'est quand même assez difficile d'être rebelle et socialement accepté.
Alors, dress code de rebelle, mais faut pas non plus déconner.
Adieu DIY, on achète les T-shirt à trous chez Celio ou aux galeries Lafayette, et si ça choque mamie au diner dominical, tant mieux, ça prouvera toute la rebellitude de ma serpillère à 200 boules.

Dans ma tête (sotte que je suis), quelqu'un qui affiche des fringues qui envoie clairement les normes sociales se faire mettre est quelqu'un qui s’assume un minimum et qui a la philosophie de vie qui va avec.
Je dis pas que cracher des grosse huitres sales (bon appétit) (j'ai un rhume, ça m'inspire) à la face du carcan social qui nous impose de nous habiller comme dans les clips de MTV interdit d'avoir un travail et de payer son loyer (avoir un toit, c'est cool, tu peux mettre tes fringues de rebelle dessous pour les protéger de la pluie).
Mais je dis que se saper comme un punkachien ou une rock star sans le sou pour faire bien dans la société est quand même un acte sacrément dégénéré.

"Rebelle mais pas trop" est le nouveau crédo.
Et ça me fait un peu mal au cul.
Ca me fait encore plus mal au cul quand les jeune fifous dingos qui vont jouer les stars dans leurs lycées ou leurs facs de lettres (oui, bizarrement, ça fait vachement moins le malin en fac de droit, ce genre d'énergumène) avec leurs blousons en cuir et leur croix en argent à l'oreille me regardent de haut en ricanant parce que je porte des chaussures de goths par dessus mes collants explosés (qui ont 3 ans au compteur)(ouaih, bah, tant qu'il y a plus de trou que de tissus, on jette pas.).
(Et pour pouvoir me regarder de haut quand je porte mes chaussures à plateforme, faut y aller, parce que je plafonne à deux mètres de hauteur. C'est pour dire le pédantisme.)

Ces mecs se sont appropriés les codes vestimentaire des mouvements undergrounds (et même plus qu'underground)(qu'après le tunnel, tu creuses) en les lissant, les rendant "socialement acceptables", pour s'approprier le côté classieux et le charisme de la chose sans faire peur à maman.
...
C'est moche.

C'est le même principe que les jeunes ***** (censuré pour des raisons de langage pas du tout approprié, même ici) qui vont se faire tatouer un lettrage sur l'avant bras, ou une clef de sol dans le cou parce que le tatouage, c'est trop badass sa race.
Et pour draguer en soirée, ça aide.
"Salut girl. Je t'offre un verre? *met son avant bras en évidence* Oh, mon tatouage. Ouaih. "The sky is the limit" Un truc vachement profond. C'est de Shakespeare, au moins. Ca veut dire que y'a pas d'plafond, ouaih. C'est beau."
(Ma seule consolation c'est qu'ils ont du pleurer leur mère parce que le tatouage, ça pique.)
(Je suis tatouée sur le poignet, je sais de quoi je parle.)
Je souhaite que tous les tatouages "Yolo" du monde s'infectent, deviennent moches et dégueulasse, et qu'on doive vous les enlever au laser dans d'horribles souffrances.
Et ça fera la fortune des dermatologues.
Karma the bitch.

Ce n'est pas le fait de se réapproprier des codes vestimentaires autrefois réservés à des groupes sociaux dont les gens avaient peur, le problème. D'un côté, ça amène un peu l'underground sur le devant de la scène, et j'ai jamais autant trouvé de T-Shirts à tête de mort de ma vie, c'est cool.
Le problème, c'est de se considérer comme une élite de la rebllitude (non, la rébellion c'est encore trop pour eux) et de la société, alors que concrètement, les codes qu'ils empruntent viennent des parias.
Et qu'en plus, ils n'ont aucun respect pour ces parias.

L'autre jour, un couple habillé en "gothiques c'est chic" parlait près de moi dans le tram du magasin des goths de la ville. Le vendeur est un peu le papa des gothiques de Dobor, il nous connait tous depuis plus de vingt ans, et il est vraiment adorable.
Et ces deux crétins, sapés avec tout les accessoires du Gothique de luxe, mitaines en velours et pantalon de cuir, ceinture à clous et Doc Martens, pouffaient de rire en disant à quel point les gens, là bas dans cette boutique, ils sont bizarres et dégénérés, et que ça leur fait trop peur d'entrer là bas.
...
La tristituuuuuuuuude.

On est rebelles, mais on l'est pas trop.
On s'habille comme ça parce que c'est cool, parce qu'on est pas des moutons comme ceux qui se fringuent en survet Adidas.
Même qu'on trouve trop notre inspiration dans Rock One, et même, Jean Paul Gaultier, il a mis des crêtes à ses mannequins le printemps dernier, c'est bien que c'est à la mode, les punks, et les trucs, là, les gens qui portent du noir et des vêtements déchirés.

Bah...
Ton T-shirt à trous des galeries Lafayette qui vaut mon bras emballé dans de la feuille d'or, j'ai le même.
Bon, à la base, il était pas comme ça, mais il a six ans, que veux tu...
Mais bon, garder les mêmes amours vestimentaires pendant plus d'un ou deux ans, c'est peut-être un peu trop te demander.
Bientôt, tu quitteras le lycée, la fac de lettre, tu trouveras un boulot, et tu oublieras ces folies adolescentes pour se concentrer sur "ce qui est important".
T'as bien raison.
Juste, si plus tard, tu pouvais te souvenir de ta jeunesse, de cette tentative de rébellion, et arrêter de considérer ceux qui sont vraiment hors des "normes" sociales comme de la merde qui marche...
Ce serait bien gentil.
Peut-être que tu gagneras ta place au Paradis, qui sait.
Petit rebelle, va.

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