mercredi 9 janvier 2013

Les anti-gothiques, c'est pas automatique.


 Aujourd'hui, on va causer vous et moi.
On va parler d'un sujet fun, d'un sujet vivant, riant, et plein d'humour.
Les Gothiques.

Wednesday, une digne représentante
du mouvement.
Toujours le mot pour rire.
Hier soir, en plein débat philosophique (en fait il était 4 heures du mat et on commatait comme des cochons dans nos draps bordés de flanelle), le Roi des Ronces m'a posé une question fort intelligente:

"J'aimerai bien savoir, n'empêche, pourquoi les gothiques se font autant emmerder."

Et après, sur ces bonnes paroles, il s'est endormi.
(Sa majesté envoie du pâté.)
N'empêche que, au delà de ça, ça m'a fait réfléchir, et le début de réponse que j'ai construite avant que le Roi ne s'endorme (avec classe, comme le veut son rang) ne m'a pas assez satisfaite, et j'ai décidé de pousser plus loin la réflexion.

Alors il faut savoir que, non, je ne répond pas toujours par l'affirmative à la question:
"Wesh, madame t'es une gôthik ou bien?"
Tout simplement parce que ça me saoule.
Mais si je devais me considérer comme appartenant à un groupe social, au delà de toute religion, opinion politique (le pouvoir au peuple et des croquettes au thon pour tous) ou quoi que ce soit, oui, je me considérerai comme une Goth.
Oui, je suis dépressive, mais c'est une maladie, ça n'a rien à voir avec le Goth. A côté de ma maladie, je suis quand même une meuf qui a vachement envie de vivre. (Ouaih. Même que je mange du nutella, des fois. C'est bien la preuve.)
Oui, je porte du noir, de la dentelle, et des rayures à la Tim Burton.
Oui, j'aime écouter de la musique dans des caves. (sauf que les soirées sur Dobor, c'est un peu pas très super.)
Oui, des fois je vais dans des églises ou des cimetières. Pour le plaisir. Parce que c'est joli. Et parce que j'ai un Nikon et que j'aime m'en servir. (Je traîne aussi dans les gares désaffectées  et les hangars en ruine. Trop Dark, la meuf.)(Rebellitude, mon amour.)
Oui.
Et donc?
Ca vous fait une belle guibole de douze mètres?
Tant mieux, j'en suis ravie.

J'aime aussi les dinosaures, les bébés animaux, les paillettes, et les licornes. (Offrez moi un truc avec des paillettes, et je vous aimerai.)
Donc...
Bref.
Je suis une "Gôthik, wesh", et euh... Voila.

(Sa Majesté le Roi Mew s'en revendique aussi. Bref. Deux "Gôthiks" dans une maison. Tristesse. On a même pas réussi à s'ouvrir les veines avec nos couteaux à nutella pendant qu'on regardait le Roi Lion.)
(On est trop True, ça fait peur.)


Et donc, en tant que représentante (huhu) de la chose, je suis directement touchée par le:
"Et donc, pourquoi que les gothiques ils se font emmerder?"
Hummm... Epineuse question.
(cliché, avez vous dit?)

Tout d'abord, c'est quoi, un Gôthik?
(Cette orthographe va me saouler assez vite.)

Un gothique, c'est en quelques sorte le hippie du punk.
(Rengainez tout de suite ces fourches et ces faux, je m'explique.) (Sauvages.)
On va faire assez vite.
Au commencement était le rock, ensuite il y eut la guitare électrique, puis les hippies (qui se sont tués avec la drogue, ou sont devenus fonctionnaires) (bien tenté, cela dit), et ensuite, la génération suivante, dégoûtée du flower power, a vomi le "no future" en laissant sortir des jeunes complètement désillusionnés, qui ont formé le rang des Punks.
Eux aussi, ils sont tous morts.
(Il reste encore Johnny Rotten, cela dit. )
C'est là que ça se gâte.
Parce qu'il y avait aussi des jeunes désillusionnés, mais qui avaient pas envie de trop s'impliquer dans ce mouvement punk, mais qui partageaient leur envie de casser les codes d'une société qui partait en cahouette (je me suis laissée dire que l’Angleterre, fin 70's, c'etait moultement pas fun).
Et ces petit dépressifs, qui se sentaient trop à part de la société mais aussi trop bien pour elle, ont décidé de former (toujours par le biais de la musique), de créer le rang des Gothiques.
(D'où le terme "les hippies du punk". Un goth est de toute façon moins catégorique dans ses choix de vie, quoique tout aussi chiant, et sa garde robe vaut cher, il lui faut donc un travail. Parce que la paire de Demonias, elle se paie pas toute seule. )
A la base, le terme c'était plutôt "Corbeaux", le mot "Gothique" ayant été, comme souvent dans ce genre de milieu, créé par un journaliste en mal d'inspiration, et rejeté en force par les premiers Corbeaux.
Mais bref, le mot est resté, et on a eu droit à une tripotée de bons groupes.
Le mouvement a bien prit en Angleterre, en France, plus ou moins, en Allemagne, et a éclaté une seconde fois avec la nouvelle vague du Goth au début des années 90 en amérique.
(Allez-y, caillassez moi pour ce résumé, n'empêche que je sais ce que je dis, j'ai tellement potassé le sujet que j'en ai fait un exposé de plusieurs heures en histoire de l'art.)

L’essence du mouvement, à la base, c'est le look (faut pas se leurrer), un état d'esprit particulièrement cynique et élitiste (et pour certains, encore assez ouvert), et une culture vaste, faite de livres, de musique et d'Histoire.
Bon, okay, c'est pas l'Histoire de madame tout le monde, plutôt une curiosité malsaine pour les grands procès de la sorcellerie en Espagne, et les contes et légendes du Nord, mais n'empêche que, c'est de la culture quand même.

Ensuite, il faut savoir que c'est un mouvement extrêmement ramifié, qui résiste, persiste et signe depuis le milieu des années 70, et qui refuse de crever. Et pour survivre, les gothiques se sont trouvés des niches improbable, comme le Cyber (sorte d'aberration fluo avec des dreads en plastique. Les goths sont des hippies en PVC. ), l'Indus (sensiblement la même, mais avec un petit côté "métal qui gueule" et de la guitare), le Steam (uchronie rétro-futuriste où le jeu c'est de customiser tes fringues comme si tu vivais à l'ère victorienne. Le Goth aime les fringues. Plus c'est voyant, classieux et WTF, plus il aime), le Color (le gothique en version migraine pantone fluo), le Lolita (import du japon, bonjour), le Médiéval (genre épique avec des dragons, tout ça...), et j'en passe.
Et le Gothique en lui-même est une personne souvent élitiste et reloue au premier abord, qui ne se laisse pas approcher, et qui défends son mouvement (qui souvent, lui a ouvert les bras et permis de se trouver une identité là où la société le rebutait et le rejetait).
Mais finalement, le Gothique, même s'il a tendance à être une vraie Princesse Biatch à paillettes noires (fluo) (si.), est quand même quelqu'un qui sait ce que signifie le rejet, et qui a suffisamment d'éducation pour avoir accepté d'être différent, bien le vivre, voir même...
En être fier.

Et c'est LA que se situe le problème.


Lisbeth Salander.
Dans sa tenue de bal.

(Les allégations qui suivent sont des faits purement véridiques et sociologiques. Le Père étant un spécialiste préhisto, je connais relativement bien mon sujet, et j'évite de dire trop de conneries sans m'être renseignée. Ci-mer.)

Depuis le début, quand l'être humain a apprit à marcher et à prendre des pierres pour se défendre contre les fauves, il a vécu en tribus.
Parce que par rapport aux grosses bestioles à dents, griffes et cornes, il était un pauvre inadapté (et oui.), et que l'union faisait la force.
La tribu a permit de chasser des grosses proies et de se protéger.
La tribu a permit de développer des liens sociaux, des spécialisations ("toi tu vas fabriquer les outils, et moi je vais chasser, okay jean-michel?"), un sens du langage et de la hiérarchie, et même une religion ("on va vénérer les cailloux, ok les mecs?" "ah non, moi je préférais vénérer les ficus, vous êtes pourris.") (en vrai, c'est le culte des morts qui signe l’apparition de la religion.).

Donc, la tribu c'était le bien.
La tribu c'était la sécurité, c'était la loi, le foyer.
La tribu, c'était TOUT.
Seul, tu meurs. Easy, le choix, quand même.

Ensuite, l'homme s'est construits de plus grands tribus.
Et les grandes tribus sont devenues des peuples, et se sont tous tapés sur la face pour jouer à un concours de stouquette géant.
Le peuple, c'était ton camps, ce pour quoi tu te battais.
Il t'apportait la fierté, la richesse.
C'était ce en quoi tu croyais, ce en quoi tu devais être fidèle.

Sortir du peuple, c'était être un traître.
Un sans patrie.
Un moins que rien.
Et là, tu meurs.
(On t'aide à mourir, éventuellement.)

Il se trouve que, maintenant, nous ne sommes plus des tribus, ni même plus des peuples, mais quasiment une nation planétaire (internet, les médias de masse, tout ça...)
Et là dedans, il se trouve qu'il y a des dégénérés pour se mettre à l'écart.
Délibérément.
Et en être content.

Oh, les cons.

Batcave ta mère.

Alors que nous sommes dans un système ou tout est uniformisé, où on vous dit quoi écouter, quoi regarder, comment vous habiller... Un système où vous n'avez plus à chercher ce que vous aimez parce que l'on vous dit quoi aimer...
Il existe des gens, intelligents, super casse-roudoudous, hautains, mais éduqués (je parle du Gothique, qui connait son rayon,a dépassé les critères d'esthétiques et de rébellion pure et dure et a gagné le grade d'adulte, au moins moralement), qui est capable de se détacher, sans haine mais avec un mépris cynique, de cette société, pour se trouver lui, dans ce qu'il aime, en dépassant bien du cadre de partout.
Qui en est fier.
Qui porte sa fierté sur sa gueule.
L'impudent.

Dans un monde où tout est uniforme, ou même la mode underground est devenu une forme malsaine de "hipster", le gothique n'a jamais été accepté.
Parce que le gothique n'en a rien à foutre.

Le Gothique vit dans un monde où il a bien comprit qu'il pouvait vivre sans la tribu.
Et que ça le rendait plus heureux.
Ouch.
Même, qu'il pouvait aller créer sa petite tribu à côté, et créer ses propre règles, en marge.
Double-ouch.

De plus, le Goth, c'est pas le Keupon.
Il se réunis pas en meute, il vit pas dans la rue, il profite même pas du système.
Il est intégré dedans, a un travail, paie ses impôts, nourrit son chat noir avec des croquettes achetée au super U.
Mais il s'en bat l'os comme de l'an quarante de ce qui se passe autour. Il n’obéît pas aux codes, il ne fait même pas semblant de les comprendre, et il n'an besoin de personne pour se prouver ce qu'il est.
Le Goth n'a pas besoin de la tribu.
Et il a quitté les codes du peuple.

L'existence même du gothique crache à la gueule de la masse.
Et il n'en a rien à secouer.

Deux gothiques à la plage.
Le bikini, c'est surfait.


Surtout que, le gothique, en bon troll des famille, va bien marquer sa différence, se l'épingler sur la face, se maquiller à outrance, s'habiller selon des modes incongrues, aller chercher du côté des symboliques qui sentent le souffre (bonjour, les croix inversées et les voiles de deuil, hohoho), et faire ça avec une décontraction qui fait enrager.

Quand on a passé sa vie à essayer de rentrer dans le moule, à pas aller chercher plus loin que le bout d'NRJ12, Celio, et autres Dolce&Gabbana, dans l'espoir d'être accepté par la tribu, ben forcément, ça te gratte sur les croûtes.

Ce mec, il te crache à la face par le simple fait de respirer.
T'es pas assez bien pour lui alors que tu veux représenter l'élite.
Et même, tu ne fais pas partie de son univers. Tu ne rentres pas dans ses codes, il ne t'accepte pas, il ne te reconnait pas comme un des siens, et il ne peut même pas reconnaître les efforts que tu fais pour faire partie de la tribu, vu que, bon, la tribu, lui, c'est comme le monstre de Loch Ness. Il en a entendu parler.
De loin.

Alors, oui, ce mec, tu vas essayer de le faire rentrer de force dans le moule.
Ce connard.
Y'a pas de raison qu'il soit heureux en dehors de la tribu, c'est quoi cette histoire. Il manquerait plus qu'on ait le droit de faire ce qu'on veut. De s'habiller comme on veut. D'écouter ce qu'on veut.
Ce mec, c'est un sheitan, c'est une sorcière, un enfant du démon.
Il faut l'insulter. Lui cracher dessus.
Le tabasser.
Le violer.
(J'y vais fort. Internet, les mecs. Cherchez les faits divers. Qu'on rigole.)
Parce qu'il n'est pas humain.
En tout cas, pas humain comme toi. Il s'est mis à l'écart, il s'est condamné tout seul.

Mais pour le Gothique, lui, les insultes, il a l'habitude.
Se faire tabasser, menacer, ça lui est déjà arrivé.
Le Gothique s'aime.
Il aime sa liberté, il aime sa différence, il aime exister par elle.
Ca ne le fera pas changer si tu lui tapes dessus.
Il sera au contraire encore plus persuadé d'avoir choisi le camp de l'intelligence.

Pourquoi les gothiques se font emmerder?
Parce qu'ils te crachent à la face.

A grand coup de dentelle noire et d'ongles laqués.

Réaction typique de gothique contrarié.








2 commentaires:

  1. Ce n'est pas parce que tu es gothique que tu es (à tendance) dépressive. Evidemment. Par contre, ce que je peux t'affirmer, c'est que l'on voit un nombre élevé de gothiques (ou pseudo gothiques) genre qui se scarifient et traitées pour dépression. Si tu es gothique et pas happy kikoolol, il y a nécessairement un lien de cause à effet. Exactement de la même manière que je n'ai pas écouté du black/death metal par coïncidence, et que je n'ai pas fait le choix de faire des études d'infirmière dans le but de bosser en chambre mortuaire, par hasard. il y a un passé qui fait que l'on devient ce que l'on est devenu.

    RépondreSupprimer
  2. Il y a une différence énorme entre les corbeaux, qui sont des adultes, et des enfants attirés par le côté morbide d'un mouvement pour exorciser leur mal être.
    Il y a énormément de jeunes qui se scarifient et sont traités pour dépression, tout court. (et je connais le sujet comme ma poche, mon oncle est un des grands pontes sur le sujet, il a été enseignant chercheur à MacGill pour des recherches sur la dépression et on en parle beaucoup.)
    On peut aussi parler des gamins babos et teuffeurs, qui non content de se scarifier, traitent leur dépression dans les champis et la MD, ou des gosses stylés "racaille" qui passent leur mal être en se défonçant à l'alcool trois fois par semaine, et en tapant des plus jeunes, etc, etc...
    (je me suis occupée de ces mômes là.)
    C'est la jeunesse qui va mal, pas les gothiques. C'était juste le côté positif des tarés de punks londoniens des 70s à la base.

    RépondreSupprimer